On sait l’admiration peu payée de retour que Beethoven vouait à Luigi Cherubini. Se rendant à Vienne en 1805, le compositeur italien rencontra Haydn et assista à une représentation de la Leonore de Beethoven sur un livret de Joseph Sonnleithner d’après une pièce française elle-même écrite d’après un fait divers de la période révolutionnaire. Il semble que Cherubini a rencontré plusieurs fois Beethoven au cours de ce séjour et qu’il lui aurait même donné certains conseils après l’insuccès de son opéra qui deviendra Fidelio.
C’est pendant ce séjour que les Viennois commandent un opéra à Cherubini sur un livret du même Sonnleithner. Basé sur le mélodrame Les Mines de Pologne du dramaturge français René-Charles Guilbert de Pixérécourt, Faniska est une histoire de fidélité conjugale qui n’est pas sans rappeler la trame de Fidelio. Créé en 1806 au Théâtre Kärtnertor (Théâtre de la Porte de Carinthie) devant l’empereur François II, le nouvel opéra de Cherubini, pourtant très apprécié par Haydn et par Beethoven, ne trouvera jamais sa place au répertoire.
Il est temps de se rappeler cette œuvre d’esprit post-révolutionnaire et de la réévaluer par rapport au projet beethovénien. Typique des « pièces de sauvetage » qui fleurissaient à l’époque (fin heureuse sur fond de guerre et de terreur), ce « singspiel », présenté ici dans sa version italienne sous la direction de Łukasz Borowicz, a été enregistré en 2020 à Poznan dans une distribution cent pour cent polonaise financée par le Ministère de la Culture de Pologne, dans le cadre d’un programme international organisé par l’Institut Adam Mickiewicz. Ce drame polonais touchant à l’universel mériterait largement une plus large audience. © François Hudry/Qobuz